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Dans cette crise inédite, les outils existants de restructuration de l’entreprise en difficulté mériteraient davantage d’exposition.
Par Olivier BUISINE, Président de l’Institut Français des Praticiens des Procédures Collectives (IFPPC)
Afin de faire face aux conséquences économiques de la crise sanitaire, le gouvernement a mis en place de nombreux outils de soutien aux entreprises (activité partielle, prêts garantis par l’Etat, avances remboursables, fonds de solidarité, etc.).
Un nouveau plan de relance est annoncé pour fin août 2020 et devrait être intégré au sein d’un nouveau Projet de Loi de Finances Rectificative 4 dont l’examen parlementaire est prévu à la rentrée.
Le vocable générique retenu en économie de « faillite » et le terme de « bouclier » sont susceptibles d’avoir un effet repoussoir vis-à-vis des nombreux mécanismes de restructurations existants pour relancer l’entreprise.
Le terme de « faillite » ne doit pas occulter les différences importantes entre les procédures existantes en droit français.
Grâce aux procédures de prévention amiable (mandat ad hoc, conciliation), les entreprises peuvent se placer sous la protection du président du tribunal de commerce et négocier l’instauration de moratoires avec les créanciers publics et privés.
Les procédures de sauvegarde et de redressement judiciaire visent également à maintenir des activités économiques, les emplois qui y sont attachés et à régler les créanciers dans le cadre d’un moratoire judiciairement accordé (plan de sauvegarde ou de redressement).
Les solutions de cession (prepack-cession, plans de cessions en redressement judiciaire et les cessions de fonds de commerce en liquidation judiciaire) favorisent en outre le maintien de tout ou partie des emplois de l’entreprise en difficulté.
Certaines entreprises ont vocation à disparaitre et à être liquidées car elles ne répondent plus aux attentes du marché, et ce indépendamment de la crise issue de la Covid-19.
Au travers de la réalisation des actifs, l’intervention des mandataires de justice (administrateurs et mandataires judiciaires) permet chaque année de réinjecter dans l’économie 7 milliards d’euros.
L’effacement des dettes favorise en outre le rebond de l’entrepreneur ayant connu l’échec.
Ainsi, si l’objectif du gouvernement de limiter le nombre des défaillances est louable, il ne doit pas conduire néanmoins à retarder inutilement l’ouverture d’une procédure collective des entreprises dont la situation est déjà irrémédiablement compromise. Cela équivaut à maintenir artificiellement « en vie » des entreprises vouées à disparaitre, engendrant une dépense publique inutile, et au détriment du respect des règles de concurrence.
La restructuration d’une dette existante dans le cadre d’une procédure amiable ou judiciaire est parfois préférable à de l’endettement supplémentaire.
Le nombre très limité (voire historiquement bas) d’ouvertures de procédures collectives depuis le 12 mars 2020 apparait antinomique avec la situation réelle des TPE/PME.
Le décalage dans le temps du traitement des difficultés, les reports de charges et l’accroissement de l’endettement au travers de l’obtention de prêts garantis par l’État pourraient aboutir à ce que les entreprises se tournent trop tardivement vers le tribunal de commerce et obérer ainsi toute possibilité de retournement.
Cela engendrerait une augmentation des liquidations « sèches » assorties de passifs très importants au détriment des créanciers et de l’emploi.
Les mesures mises en place par le gouvernement et celles envisagées dans le cadre du plan de relance doivent en conséquence être appréhendées de façon complémentaire avec les outils de restructurations existants en matière de droit des sociétés et de droit des entreprises en difficulté dans l’intérêt du tissu économique national.
Gageons que la mise en œuvre du plan de relance s’accompagne de la promotion des outils de traitement amiable et judiciaire des difficultés des entreprises.